Telle une reine, tresses Nefertiti* [la reine est venue] avec des perles aux extrémités, tenue kimono traditionnel japonais et baskets, Jahelle Bonee ne plonge pas son spectateur que dans son univers musical. Il y a, dans sa prestance, l’art capillaire (punch, boxlocks, nattes, tresses, etc.) et le style vestimentaire, à voir. Jahelle, l’artiste, est constamment dans une recherche d’esthétique qui fait corps avec son univers musical, inspirant, ouvert sur sa réalité sociale, son rapport avec l’autre (Nwolè) et sur le monde.

En témoigne par ailleurs, dans sa création musicale, cette récente collaboration [Electro-Jazz] avec l’artiste français Praktika (Dj Jérôme Fouqueray) et le balofoniste Innocent Kimpé du Burkina Faso qui, ensembles, questionnent l’histoire et rendent hommage à ‘’Zélé’’ de Papara, la cantatrice ivoirienne originaire du nord de la Côte d’Ivoire, grande figure du patrimoine culturel et artistique du pays, décédée en 1995. Avec ‘’Zélé’’, le single, Jahelle (voix principale) n’hésitera pas à s’engager pour la cantatrice et prend d’ailleurs plaisir à vivre l’expérience Electro-Jazz avec Praktika, à la programmation.

Présente à Boundiali, à l’occasion de la 8è édition du Festival international du Balafon (Djéguélé Festival), c’est naturellement à « Zélé » – titre-hommage extrait de l’album Balani Factory de onze titres – que revient l’honneur d’ouvrir (intro) son répertoire [Jahelle Bonee] sur la scène du siège dudit festival. Avec des sonorités propres à la culture sénoufo et rythmées par le balafon de Yaya (non celui de Kimpé), la musicienne ne fait pas dans l’interprétation mais chante (en baoulé, dioula, sénoufo, français, anglais) du Jahelle Bonee : afro soul, afro jazz, hip hop.

Depuis 2023, le Djéguélé Festival a initié, telle une soirée de bienvenue annonçant les grandes scènes (concerts), la soirée « Jazz – balafon ». Jouant aussi bien à la percussion qu’à l’ahoco (instrument de musique en pays baoulé), l’univers musical de Jahelle explore tous les possibles. Comme « Zélé », musique d’inspiration traditionnelle, l’artiste revisite des pages glorieuses de la scène urbaine ivoirienne avec « Djolo national » des Yang System et fait du célèbre « Cocody rock » d’Alpha Blondy, un jazz-reggae qui donne au reggae une coloration personnelle qu’elle puise dans son univers musical. Un bonheur du public et du directeur du Djéguélé Festival Koné Dodo, manager par le passé de la star reggae.

Avec Jahelle, la scène est un partage et le public n’est pas que spectateur. Il devient, dans le partage, un chœur ou se laisse visiter par la danse au son de « Meet my soul », son deuxième album de 14 titres ou « Béflehmi », le premier. Par le pouvoir des mots, l’artiste fait connaître à son public « la puissance de leur impact ». S’il est clair que le groove y est, Jahelle qui trace – le pas assuré – sa voie tout en marchant dans celle de ses aînés, a collaboré avec Paco Sery, Oswald Kouamé, Kajeem… sur le récent « Meet my soul ».

Honorée de cet amour – musical – de grands frères, si elle « garde [sur les épaules] la tête bien droite », tel que chanté dans « Meet My Soul », Jahelle en est consciente : ‘’ce n’est que comme ça qu’une reine garde sa couronne’’.

Sur la scène du Djéguélé Festival, comme ailleurs, Jahelle est accompagnée de talentueux jeunes musiciens. Présents à la 2è édition du Festival international de Jazz et Cultures urbaines (Fijca), à Yopougon où ils étaient invités – tout comme Jahelle – c’est spontanément que Johanna Welter (clarinette), Guillaume Repain (guitare) se sont joints au band pour partager de belles émotions au Festival international du Balafon (Djéguélé Festival), à Boundiali.

Outre ses deux albums, Jahelle Bonee est auteure de singles dont Barakai (2017), Wôrô Wôrô driva (2019), Karma (2022), Ils diront (2023), Bien avant nous (2024).

Koné SEYDOU